Réunion inter-facs à l’occupation de l’université Nanterre

Samedi 8 janvier une cinquantaine d'étudiants, venus de toute la France, étaient présents à l'occupation de Nanterre en vue de lancer un appel national à la mobilisation et à la coordination contre la précarité étudiante.

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Samedi 8 janvier une cinquantaine d’étudiants, venus de toute la France, étaient présents à l’occupation de Nanterre en vue de lancer un appel national à la mobilisation et à la coordination contre la précarité étudiante. Deux dates ont émergé : le 27 janvier prochain, en soutien à la manifestation interprofessionnelle, et le 3 février où les universités sont appelées à construire une journée de mobilisation.

Oscar Costica

Quelles perspectives pour la jeunesse ? La colère sourde des étudiant.e.s

La rencontre a été immédiatement introduite par le slogan « étudier est un droit, pas un privilège ! », dénonçant ce contre quoi les organisations et étudiants luttent : la précarité dans les universités, qu’elle soit visible à travers le recours toujours nécessaire aux dispositifs d’aide alimentaire, aux 40% d’étudiants exerçant des jobs aux contrats souvent précaires, sous-payés et en première ligne du Covid, ou par les embûches de toutes catégories menées par les directions universitaires.

Dans cette continuité la suppression des repas CROUS à 1€ ou, ce qui les a cyniquement remplacé, le « cadeau » de 100€ pour les étudiants boursiers à Noël ne sont que de vagues mesures, signes de mépris du gouvernement envers la jeunesse. Sans oublier le comble : au moment où le nombre de cas dus au variant Omicron explose, le ministère de l’ESR décide de maintenir les universités ouvertes avec un protocole sanitaire quasi-inexistant… Et peu importe si les hospitaliers, comme ça a encore été le cas cette semaine, décrient toujours les problèmes de sous-effectifs ou de manque de place dans leurs services. Quoi de plus simple que de faire la politique de l’autruche plutôt que d’investir, comme la situation l’exige, dans la création de postes, de structures, et dans la mise en place de mesures sociales et sanitaires opérantes ?

Comme le rappelle un étudiant qui, suite aux difficultés liées au Covid, a perdu son année et sa bourse, le message envoyé aux étudiants est : « ne revenez pas ». A Nanterre la mobilisation des sans facs, qui occupent les locaux de la présidence de l’université depuis plus de deux mois afin d’obtenir l’inscription d’une poignée de dossiers, est la preuve presque caricaturale de ce délaissement par les institutions étatiques et locales. A titre d’exemple ladite présidence a préféré couper le chauffage et est allée jusqu’à clouer les fenêtres de ses locaux plutôt que de procéder aux quelques inscriptions revendiquées.

Ainsi, sans se laisser démotiver, les occupants ont appelé à une réunion inter-facs à échelle nationale, tenue samedi dernier, dans la perspective de construire une coordination sur la base de revendications communes. Malgré le contexte difficile de crise sanitaire et d’approche des élections présidentielles, Victor, figure étudiante de Nanterre et militant à l’Unef-Tacle et au NPA, dresse un constat : « Il y a un enjeu aujourd’hui, au-delà des étiquettes syndicales ou associatives, à réunir les différentes organisations étudiantes dans la perspective de construire un mouvement national dans les universités ». Et cette construction, comme le rappellent Alioune et Mario, étudiants à Paris 8 et membres du CEE (Collectif des étudiants étrangers), qui bataillent depuis bientôt 1 an pour régulariser une dizaine de dossiers avec la présidence de leur université et la préfecture, est avant tout le fruit du soutien mutuel entre les étudiants : « Il y a des problèmes de sélection partout » ; « vous étiez là pour nous, c’est normal qu’on soit là pour vous ».

La sélection en Master : un recul tactique du gouvernement 

Alors que le nombre d’étudiants augmente et que les moyens stagnent, le gouvernement Macron avait prévu, dans la continuité des précédentes offensives menées dans les universités, d’instaurer une réforme courant février 2022 calquée sur le modèle de Parcoursup. Après la hausse des frais d’inscription pour les étudiants étrangers, de plus en plus appliquée individuellement par les universités, celle-ci avait pour objet d’instaurer une nouvelle sélection pour pouvoir accéder au M1 ce qui, à force, constitue une réponse presque traditionnelle pour éviter de financer les universités et la recherche et, si ce n’est instaurer la privatisation, inculquer l’idée que l’université est un endroit qui doit être restreint (et rentabilisé si l’on pense à la hausse des frais d’inscriptions, qui touche pour l’instant les étudiants extra-communautaires). 

Pour autant cette réforme a été reportée : nous sommes avant tout dans une année électorale, il s’agit de faire bonne figure donc place aux compromis tactiques et au resserrement au niveau local, comme à Nanterre ou à Paris 8. Il reste cependant tout à parier, et il suffit de regarder les précédentes expériences, que le prochain gouvernement se remettra rapidement de la trêve sanitaire et politique pour reprendre le courant de l’éjection sociale à l’université. Mais ce report montre également autre chose : la peur de voir se développer un mouvement de contestation car, au-delà de cette réforme et des attaques locales, c’est tout un climat anti-social et une précarité accentuée qui ont caractérisé ces dernières années.

Se mobiliser avec les autre secteurs ou construire un mouvement en propre ?

Comme le rappelle Mario, si « étudier est un droit, oui, mais on n’étudie pas quand les droits ne sont pas respectés ! ». Les étudiants sont avant tout dépendants de leurs conditions sociales et économiques dont ils disposent en amont ; or comment étudier lorsque les réformes du travail, les attaques contre les secteurs publics, contre le système de retraite, ou les lois et discours xénophobes, conditionnent les licenciements, l’épuisement, l’exclusion, et le manque de ressources ? Dans ce sens il faut rappeler un terrain commun, directement politique : la lutte contre les idées infectes de l’extrême-droite qui se décomplexifient également dans les universités à mesure que les réactionnaires comme Zemmour investissent les espaces médiatiques et institutionnels.

Dans un contexte où les dernières grandes mobilisations étudiantes, que ce soit en 2016, 2018 ou 2020, ont constitué non seulement un appui de taille pour les secteurs salariés mais ont aussi démontrés qu’elles étaient capables de se développer en propre et de faire reculer le gouvernement, il reste toujours nécessaire à ce que les différents secteurs se soutiennent tout en continuant à se mobiliser sur leurs propres terrains.

A l’issu de l’appel relayé ci-dessous, deux dates ont été retenues par la réunion inter-facs, autour desquelles les étudiants et les organisations sont appelés à construire une mobilisation : le 27 janvier, lors de la manifestation interprofessionnelle, et le 3 février, où les universités sont invitées à manifester leurs revendications en propre.

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