Rodolfo Torres, le 5 octobre 2022, paru dans Izquierda Web.
Cela fait des années qu’il n’y avait pas un conflit d’un secteur de la classe ouvrière industrielle si long, si massif, si dur et avec une direction indépendante. La lutte des ouvriers du pneu (FATE, Bridgestone, Pirelli) a réussi à se placer au centre des événements politiques d’Argentine, pendant 10 jours, et marque un avant et un après dans la situation politique.
Nous, le Nuevo MAS, Manuela Castañeira, les jeunes du collectif étudiant Ya Basta, le courant syndical 18 Décembre et les livreurs du SITRAREPA, sommes fiers d’avoir soutenu inconditionnellement nos camarades tous ces longs mois de lutte dans les manifestations, devant les tribunaux, dans les blocages aux portes des trois usines, dans le camp de rue devant le ministère du travail, puis aux portes des entreprises, et enfin lors des négociations tendues et longues qui ont duré plus de trois jours aux portes du ministère. Nous vous félicitons pour cet acte heroïque qui est déjà rentré dans les pages de l’histoire.
Le jour j est arrivé. Le vendredi 30 septembre, l’assemblée générale des ouvriers du pneu, avec plus de 1 500 camarades présents, a approuvé l’accord et célébré une victoire politique catégorique pour les travailleurs. Ils ont fait face à trois patrons très durs et puissants, qui ont mobilisé toutes leurs ressources et leur influence pour les battre. Le gouvernement dans son ensemble et le ministère du travail en particulier ont fait toutes sortes de manœuvres pour les vaincre. Les médias ont agi comme haut-parleur des mensonges patronaux, la bureaucratie syndicale et même les chefs de la CGT ont demandé d’en finir avec le « mauvais exemple » des travailleurs du pneu. En plus des politiciens d’extrême droite comme Patricia Bullrich et Espert ont demandé publiquement de réprimer les ouvriers avec des balles réelles.
Les travailleurs ont fait face à tout cela et ils s’en sont sortis : ils ont célébré la victoire. Ils savaient que si le conflit était perdu, cela aurait provoqué une défaite très dure avec des centaines des licenciements, avec la tentative d’interdiction du syndicat et la destruction de toute la riche expérience des travailleurs du pneu qui vient d’une longue tradition de lutte depuis 2007.
Les ouvriers ont eu une victoire dans la lutte contre l’austérité et ils ont également défendu leur droit démocratique à se manifester dans la rue. Ils ont démontré, une fois de plus, le poids des secteurs les plus concentrés de la classe ouvrière, des secteurs stratégiques, qui, avec un syndicat de « seulement » 5 000 travailleurs, a réussi à paralyser une partie centrale de l’économie nationale et ont obligé le gouvernement à se décider pour la négociation et l’accord [1] .
La lutte contre l’austérité du gouvernement et la défense du droit syndical
Le gouvernement Fernández n’a appliqué que des recettes d’ajustement budgétaire. Le superministre Sergio Massa applique directement l’ajustement selon les critères du FMI et de l’ambassade des Etats-Unis. Cristina Kirchner reste silencieuse et justifie tout par l’argument que « la situation doit être stabilisée ».
L’inflation des produits alimentaires est suivie par l’augmentation des prix des services essentiels, des coup budgétaires dans l’éducation et la santé et même dans le budget pour les handicapés.
Le gouvernement a tenté de briser la lutte. Ce fut d’abord le ministère du travail avec le ministre Moroni à sa tête, puis Sergio Massa en personne qui a essayé le chantage pour briser la lutte des camarades.
Il est vrai qu’il y a eu des avances et des reculs. Un secteur de la bureaucratie syndicale dirigé par Moyano, n’était pas tellement intéressé à briser la lutte du SUTNA (syndicat des travailleurs du pneu). Au contraire, ils ont poussé pour un accord.
En Argentine, il n’y a pas que des attaques économiques. Il y a tout un courant politique et médiatique qui veut en finir avec le droit de manifester. Combien de fois par jour entendons-nous dans les médias des expressions contre les personnes qui manifestent, contre les blocages de rues et contre les luttes en général ? Un journaliste a dit à Crespo, secrétaire général du SUTNA, dans un reportage, de « protester mais sans bloquer les rues ».
Ce courant n’est pas seulement argentin, il est continental. Il est dirigé par Trump et Bolsonaro, et il menace les libertés démocratiques : ils veulent mettre fin au droit de manifester, de s’organiser et de se battre.
Réfléchissons un instant à ce qui se serait passé si l’extrême droite avait atteint son objectif et si on n’était pas descendus dans la rue le vendredi 9 septembre pour protester contre l’attentat contre Cristina Kirchner. Très probablement, le gouvernement aurait déclaré l’état d’exception et toute la situation aurait pris une tournure réactionnaire. Quelles réelles possibilités y aurait-il eu de camper devant le ministère du travail ? Aucune.
Pour nous, la lutte contre l’ajustement et la défense du droit à l’organisation indépendante de la classe ouvrière ne sont pas deux choses séparées par un mur infranchissable. Et c’est précisément ce qui a mis le conflit ouvrière au centre de la scène : la lutte contre les conditions salariales et l’exploitation des travailleurs et la défense de la tradition démocratique historique forgée dans le syndicat ces 15 dernières années (la défense du SUTNA indépendant).
Le conflit a montré les débats qui se déroulent entre ceux d’en haut : entre les partisans de l’arbitrage (toujours à l’avantage des patrons, mais l’arbitrage à la fin) et les partisans de briser les luttes, d’écraser les ouvriers, de restreindre les droits démocratiques pour imposer des réformes structurelles. Ce débat n’a pas été réglé en Argentine, mais la lutte des camarades du pneu nous a laissé dans une meilleure position, devenant un exemple pour toute la classe ouvrière (de nombreux camarades, lorsqu’il s’agit de sortir pour se battre ou revendiquer, disent maintenant « qu’il faut faire comme le pneu »).
L’irruption de la base et la radicalisation du conflit
Le 17 mai, la première grève du syndicat a eu lieu. S’en sont suivis une infinité d’arrêts de travail dans les différentes usines : de 4 heures, de 8 heures (une journée complète), 48 heures. à plusieurs reprises chez Bridgestone, etc. Il y a eu d’innombrables grèves spontanées dans le secteur et dans toutes les usines face aux différentes provocations commerciales : marches, blocages des usines, blocages des routes, des actes de fraternisation avec les voisins, etc., qui se sont soldés par une grève pour une durée indéterminée qui a duré 9 jours.
Dans un conflit si long, il y a eu de nombreux moments et situations, mais nous voulons marquer ici ce qui, à notre avis, a été le point clé du conflit, qui a marqué un avant et un après (en réalité, c’était le début de la deuxième étape du conflit ) : la provocation du patronat et du ministère du Travail de vouloir fermer unilatéralement la négociation et l’ignorer de fait.
La présence permanente du syndicat au batimentet le début de la grève illimitée marquèrent l’irruption massive de la base dans le conflit. Il y a eu 10 jours d’intervention massive de la base des trois usines (c’était un avant et un après, la raison de la victoire de la lutte). D’abord dans le campement devant le ministère, puis aux portes des usines et enfin dans les mobilisations lors des négociations en Allemagne et de l’énième provocation du gouvernement, cette fois dans par Sergio Massa (un élément important est que la base a fait une expérience importante avec ce qui est aujourd’hui la principale figure du gouvernement).
Après la « prise » du ministère, le conflit a acquis une importance nationale. C’est devenu un événement politique qui a imprégné toute la société, et la classe ouvrière et la majorité populaire ont ressenti une profonde sympathie pour les camarades du pneu.
L’irruption de la base et la transformation du conflit en conflit politique, qui ont mis le pays au bout des nerfs, ont été les éléments centraux qui ont permis de gagner la lutte et ont montré ce que cela signifie d’avoir 3 000 ouvriers de l’industrie fermement unis dans la lutte (imaginez ce qu’il y aurait 30 000 ou 300 000 ou 3 000 000 de travailleurs qui se battraient ensemble, ils mettraient le pays sens dessus dessous [2] ).
Les revendications et les victoires
En mars, la discussion a été ouverte sur la cinquième tranche de la négociation conjointe de la période juillet 2021/juin 2022 et la nécessité d’avoir une augmentation réelle a été évoquée ; c’est-à-dire 5 % au-dessus de l’inflation pour la période. De plus, le paiement de 200 % des heures travaillées le week-end a été réclamé, une revendication historique qui vise à compenser financièrement le fait de ne pas pouvoir être en week-end et en repos avec ses proches. Cette revendication remet en cause les contre-réformes du travail introduites depuis les années 1990 ; d’où l’inflexibilité des patrons et du gouvernement et son caractère politique et non syndical : c’est une revendication qui n’est pas compensée par quelques pesos de plus ; elle questionne les conditions mêmes d’exploitation des travailleurs [3] .
L’augmentation des salaires réels et, surtout, les heures à 200 % le week-end, ont été l’axe de la campagne de la Liste Noire (liste syndicale qui dirige le SUTNA, lié au Partido Obrero) aux élections des délégués qui se sont déroulées début avril. Le 13 du même mois, les demandes sont ratifiées en assemblée générale.
Fondamentalement, l’accord garantit de ne pas perdre par rapport à l’inflation, situe les salaire à 10% au-dessus de l’inflation, de plus, il prévoit une prime de 100 000 pesos et une autre prime de 34 800 pesos en décembre. Les heures à 200 % n’ont pas été gagnées.
Mais ne faire le bilan qu’au niveau strictement numérique ou syndical, c’est ce que font des secteurs patronaux comme la Liste Violette (lié au gouverment) : « tant d’efforts pour ça », disent ces traîtres, eux qui sont justement ceux qui brissaient les luttes dans les années 90 !. Ce que la Liste Violette affirme n’est pas seulement un mensonge flagrant du point de vue salarial, mais elle ignore totalement que dans tout conflit sérieux, et celui-ci l’était, les chiffres sont en jeu mais surtout d’autres choses très précises et plus importantes comme le rapport de force entre les ouvriers et les patrons. Et dans ce cas, c’est l’expérience la plus avancée du mouvement ouvrier au cours des 20 dernières années au moins.
Le conflit a été gagné et constitue un énorme triomphe politique d’une immense projection dans tout le mouvement ouvrier. Car ce qui était en jeu, ce n’étaient pas seulement les heures à 200% mais toute l’organisation ouvrière : le syndicat récupéré, toute la riche expérience accumulée de la lutte, la tradition de rassemblement, la démocratie ouvrière, l’action directe, le rapport aux partis d’extrême gauche et les mouvements de solidarité de classe, de solidarité internationale, d’unité de classe et de politisation qui traversent -surtout- les bases syndicales, depuis plus de 15 ans [4] .
Et qu’est-ce qui a été obtenu? Ni plus ni moins que le maintien de l’organisation, un rapport de force favorable : imposer des conditions politiques aux patrons. Combien de fois entendons-nous qu’avec des mesures d’austerité ils ne négocient pas? Ils ont négocié et signé après une grève illimitée. C’est tout cela que célébrait l’assemblée ouvrière.
La « Liste Noire » et l’orientation de la lutte
La Liste Marron du SUTNA (lié au Nuevo MAS), a fait des propositions et a contribué, publiquement et en temps réel, à mener le combat. D’abord, il a été exigé que le conflit soit projeté politiquement afin de le gagner et d’inclure la base dans la lutte. Et c’est ce qui s’est finalement produit à la suite de la provocation du gouvernement. Nous le répétons : nous proposons systématiquement de donner une orientation plus politique au conflit, en ciblant le gouvernement et non seulement les patrons : Amener le conflit dans la rue et faire appel à tous les travailleurs qui souffrent des conditions similaires à celles du pneu.
Le 22 août, un tract distribué dans tout le syndicat déclarait : « Comme le dit le proverbe, « le fil est coupé pour l’endroit le plus fin » , et aujourd’hui le maillon faible est le gouvernement. Il faut pointer le gouvernement pour que le ministère du travail se prononce en faveur des travailleurs. Ce que nous considérons comme une voie à suivre, c’est de faire payer au gouvernement les coûts politiques ».
Le 31 août, la Liste Marron proposait : « Il faut sortir dans la rue pour demander des comptes au gouvernement, qui soutient les entreprises et retarde de plus en plus les audiences, jouant à l’epuissement. Nous devons convaincre l’opinion publique de soutenir le conflit, les millions des travailleurs qui ont du mal à cause de l’inflation et maintenant il y a une augmentation de tarifs et de coupures dans les budgets de l’éducation et de la santé qui vont affecter le pouvoir d’achat des travailleurs ». Plus tard, et à plusieurs reprises, il a été proposé de bloquer le périphérique de la ville de Buenos Aires.
Nous avons souligné que c’était une erreur de donner une approche purement syndicale au conflit. Qu’il fallait l’élever à un niveau politique plus général. Que la revendication des heures à 200% n’est pas seulement revindicative mais éminemment politique car elle remet en cause les conditions d’exploitation que la Liste Violette a laissé passer dans les années 90. C’est-à-dire : c’est une revendication qui pointe contre les réformes des années 1990 soutenues par tous les gouvernements depuis ces années.
En résumé : La Liste Marron soulevait tout le temps (et la Liste Noir avait du mal à comprendre) qu’une revendication comme les heures à 200% ne peut pas être l’axe d’une simple campagne électorale syndicale ; mais que pour imposer une telle revendication, il faut s’élever à un plan plus général de la bataille politique. Il faut l’utiliser comme un drapeau pour unifier toute la classe ouvrière précaire et surexploitée, quel que soit le syndicat auquel elle appartient. Tous les travailleurs sont nos frères et sœurs, nos camarades, outre le fait que l’une des leçons fondamentales de la lutte est que les combats sont gagnés lorsque tous les camarades, toute la base, les prennent en main, tout comme c’est arrivé lors de l’occupation pacifique du ministère.
Un exemple pour tout le mouvement ouvrier
Cela fait des années qu’on n’a pas vu de combat de toute une branche syndicale industrielle et stratégique; avec tous les attributs que lui confèrent la loi et la tradition du mouvement ouvrier argentin. Une branche récupérée des mains de la bureaucratie syndicale. Un syndicat qui depuis 2007, avec des hauts et des bas aussi, a des pratiques d’assemblées générales démocratiques et une tradition de lutte énorme. Une branche qui a récupéré le syndicat de San Fernando en 2008 et qui depuis 2016 dispose d’une direction indépendante au niveau national. Cette branche concentrée dans seulement trois usines (mais trois usines de taille, FATE, Bridgestone, Pirelli) a mis à bout trois énormes multinationales, touché le fleuron de l’industrie nationale comme l’industrie automobile, et toute sa chaîne de valeur. Les terminaux ont dû arrêter les lignes faute de matériel.
Réfléchissons une seconde à ce que la classe ouvrière argentine pourrait faire si elle n’en avait pas un, mais 5 ou 10 syndicats industriels avec des directions indépendantes. On comprend pourquoi les patrons et les gouvernements bourgeois ont déployé tant d’efforts pour maintenir la bureaucratie syndicale. Au-delà des divisions et des différences entre les bureaucrates Daer et Moyano (divisions et différences dont nous devons profiter lorsque nous sortons au combat mais sans tomber dans les pièges d’aucun d’entre eux), ils font tous partie de la couche sociale parasite qui vit de contrôler et de trahir la classe ouvrière.
Tous maintiennent ou du moins essaient d’entraver et d’atomiser le mouvement ouvrier; ils ne tolèrent pas le moindre vestige de démocratie ouvrière. Avec les patrons, ils ont imposé de véritables dictatures à l’intérieur des usines et des lieux de travail. Ils se maintiennent grâce à leurs relations avec le gouvernement et le patronat et en menaçant de licencier les travailleurs qui ne s’y soumettent pas. Pour cette raison, tous les gouvernements et les députés bourgeois maintiennent les lois et les statuts anti-démocratiques des syndicats.
Tout cela a été judicieusement synthétisé par les camarades des pneus quand ils ont chanté : « Elle est où ? On ne voit nulle part la célèbre CGT » (Les bureaucrates étaient n’importe où sauf dans la rue à côté des ouvriers en lutte). Et lorsqu’ils chantaient contre le ministre Sergio Massa ou encore pour « l’unité des travailleurs ».
La lutte des ouvriers a servi également dans la discussion contre tous ceux qui parlent d’un « adieu au prolétariat » en niant l’immense centralité structurelle de la classe ouvrière dans le mécanisme capitaliste. Une petite partie des travailleurs de l’industrie a pu montrer son potentiel et sa capacité à mettre les vrais problèmes des travailleurs au centre, paralysant le pays.
Et profitons-en pour souligner que ni la CGT ni la CTA, au-delà de proposer un soutien dans certains cas et de collaborer à la conclusion de l’accord dans d’autres, n’ont pas bougé leurs bases de manière pratique en soutien aux luttes. Seuls les courants de la gauche révolutionnaire étaient présents jour et nuit soutenant toutes les mesures de lutte, cela était visible pour de nombreux camarades, parmi eux, notre parti le Nuevo MAS, qui a milité dans son intégralité pour la victoire de la lutte.
L’avenir
Ce chapitre est terminé mais il ne faut pas croire que « des années de tranquillité et de paix » arrivent. Les patrons ont leur programme et leurs intentions : productivité au niveau international, baisse de l’absentéisme, travail continu, etc. Cette fois, ils n’ont pas pu réussir. Mais ils réfléchissent déjà à comment reprendre l’attaque, c’est pourquoi on ne baisse pas la garde.
Il faut approfondir l’organisation, la politisation, la démocratie ouvrière, et renforcer les courants classistes du syndicat comme la Liste Marron, qui a été en première ligne de la lutte tous ces longs mois dans l’unité avec tous les camarades et avec toutes les listes de combat : avec la Noire, la Rouge, la Bordeaux et la Grise.
La Liste Marron c’est une liste qui revendique la discussion démocratique entre militants parce qu’elle sait que personne ne possède la vérité, ni la lutte, que le débat honnête et franc est un élément irremplaçable de la démocratie ouvrière.
Et, surtout, continuer à hisser haut le drapeau des 200% d’heures le week-end, comme drapeau de toute la classe ouvrière contre la réforme du travail et contre les conditions d’esclavage du travail que les gouvernements capitalistes veulent imposer.
Notes
[1] Il y a des années, à Gestamp et Lear, il y avait d’autres conflits hiérarchiques entre secteurs du prolétariat industriel dans la zone nord du Grand Buenos Aires qui se sont soldés par de lourdes défaites, fondamentalement parce qu’il s’agissait de conflits d’usine isolés.
[2] Il est très clair que si cela n’est pas courant, c’est à cause de la bureaucratie syndicale qui anesthésie et rend difficile pour notre classe de lutter de manière unitaire et politique, pour ainsi dire. Par politique, nous entendons dépasser ce qui n’est que revendicatif, comprendre qu’en plus des patrons, il y a le problème du gouvernement et, surtout, que les collègues hommes et femmes du syndicat d’à côté sont nos frères et sœurs ; chaque syndicat n’est pas, ne doit pas être, un compartiment étanche.
[3] Il va de soi que la simple revendication salariale prend la figure du travailleur exploité en tant que tel : de l’argent pour compenser une exploitation qui n’est pas remise en cause. Les heures à 200%, la remise en cause de l’accord, vont plus loin : elles remettent en cause la condition même d’être exploité, et pour cette raison elles ont été la revendication la plus profonde du conflit.
[4] Les conflits de 2007 et 2008 ont été à la base de toute l’expérience qui se poursuit à ce jour et contiennent même le conflit que les ouvriers du pneu viennent de gagner.