Ce chiffre glaçant de 900 féminicides est une conséquence directe de la politique patriarcale exercée et incarnée par les différents gouvernements de Macron. Il y a quelque chose d’inconcevable à imaginer cette multitude de femmes poignardées, défenestrée, étranglées, mutilées, battues à mort, sans que cela ne semble bouleverser l’agenda de la classe politique au pouvoir. Au contraire, la macronie continue à briller dans sa maîtrise de la culture de l’impunité et de la protection des agresseurs, et les dernières actualités sont autant de crachats au visage des victimes et de leurs allié.es. NEUF CENTS FEMINICIDES. Non, pour reprendre le titre d’un livre de la féministe libertaire Lola Lafon, de ça, on ne peut pas se consoler.
Complicité macroniste avec le terrorisme machiste
Les membres des gouvernements macronistes reprennent sans scrupule aucun le concept d’extrême-droite de « terrorisme intellectuel » pour qualifier certain.es universitaires et personnalités de gauche, mais s’il fallait vraiment récupérer cette odieuse expression, il serait pertinent de parler de complicité intellectuelle des gouvernements successifs avec le terrorisme machiste.
Depuis le premier quinquennat d’Emmanuel Macron jusqu’à aujourd’hui, et en dépit de son effet d’annonce sur cette fameuse « grande cause du quinquennat », les violences sexistes et sexuelles demeurent largement tolérées, et même entretenues par le système politique en place.
Parmi les derniers faits d’armes de la macronie dans ce domaine, il y a bien sûr la prise de parole scandaleuse du président de la République au sujet de l’affaire Depardieu, évoquant une « chasse à l’homme » et un acteur « rend[ant] fier la France », mais aussi la remise en question de la pérennité de la CIIVISE (Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants), avec une attaque directe contre son indépendance et sa combativité. Le gouvernement français s’est encore illustré récemment avec le refus d’adopter une législation européenne définissant le viol sur la base de la notion de non-consentement.
La rhétorique macroniste au sujet des violences se réduit le plus souvent à une exhortation adressée aux victimes de parler et porter plainte (une logique bien pratique par ailleurs, qui vient de nouveau effacer la responsabilité des agresseurs et la faire porter aux victimes), sans interroger la capacité des institutions policières et judiciaires à accueillir leur parole. Pourtant, 73% des plaintes pour violences sexuelles sont classées sans suite. Le pouvoir en place ne remet pas non plus en question sa propre responsabilité dans la silenciation des victimes : celles qui ont parlé et que les puissants ont fait taire en invoquant « le tribunal médiatique », leur crainte d’une « société de la délation », et celles qui n’osent pas ou plus parler en conséquence.
La macronie ou le réarmement du backlash
Pire qu’une complicité intellectuelle avec les agresseurs, il s’agit donc bien d’une complicité en actes. En réalité, la macronie ne s’illustre pas par son inaction face aux violences sexistes et sexuelles comme on pourrait le penser de prime abord. Non, la macronie s’illustre par des choix politiques intentionnels qui entretiennent ce système de domination et de violence.
L’exemple édifiant que nous ne devrions jamais oublier reste la nomination et le maintien en poste d’un violeur au gouvernement, et ce tout du long des très longues années des deux quinquennats de Macron. Après avoir occupé le ministère de l’action et des comptes publics de 2017 à 2020, Gérald Darmanin continue à occuper le poste de ministre de l’intérieur et des outre-mer depuis juillet 2020. Après un énième remaniement début février 2024, dans ce jeu des chaises musicales macronistes, au milieu de tant d’instabilité, ce que l’on peut retenir c’est que la continuité de la macronie, c’est le maintien en poste d’un violeur raciste et misogyne. Il faut continuer à s’en étonner, à s’en scandaliser. La nomination au ministère chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations d’Aurore Bergé, ex-militante de la Manif pour tous ayant développé des affinités avec des transphobes notoires, est une autre illustration de l’antiféminisme conservateur du macronisme.
Quoi de plus cohérent avec la politique de défense des riches et des puissants menée par Emmanuel Macron que de choisir de protéger et soutenir les agresseurs ?
C’est ainsi que l’on apprend cette semaine que la vice-présidente choisie par le gouvernement pour la CIIVISE aurait agressé sexuellement une victime d’inceste lors d’un examen médical dans le cadre de ses fonctions de médecin légiste. C’est le retour de bâton que rejoue continuellement la macronie : ils nous incitent à « libérer la parole » en déposant plainte dans les commissariats, mais ils mettent Gérald Darmanin à la tête de l’institution policière ; ils créent une Commission visant à porter les témoignages de milliers de personnes abusées dans l’enfance, mais ils remplacent le très compétent juge des enfants Edouard Durand par des pantins eux-mêmes agresseurs.
Les gouvernements macronistes successifs persistent à se draper dans leur prétendu progressisme alors que leur antiféminisme, en mots et en actes, est une preuve quotidienne qu’ils ont du sang sur les mains.
Pour une politique de santé publique luttant contre les violences, une seule solution : la révolution féministe !
Face à la politique de mépris des victimes conduite par Macron, il faut poursuivre la lutte contre les violences sexistes et sexuelles aux côtés des militant.es, des victimes et de leurs allié.es, continuer le travail de conscientisation et contribuer à démocratiser les pensées féministes.
Une vraie politique de santé publique avec des mesures éducatives, sociales et juridiques est indispensable pour désarmer les agresseurs et la culture d’impunité qui les entretient.
Tant que la classe politique au pouvoir s’obstinera à faire semblant de ne pas comprendre que les violences sont un problème de santé publique, qui nécessite de mettre en place des moyens humains, matériels, institutionnels à la hauteur de cet enjeu, nous allons continuer à refuser de compter nos mortes dans le silence et l’indifférence. Nous allons transformer notre perte inconsolable et notre colère contre le système d’impunité en autant de cris de rage pour la révolution féministe.
La violence n’est pas une fatalité. Il nous faut penser un projet de société global, « réparer nos récits » pour reprendre les termes d’Adèle Haenel. Contre la politique macroniste de précarisation des vies, contre les lois racistes dégradant les conditions de vie des populations migrantes, et face au constat que ces choix politiques sont autant de vecteurs des violences faites aux femmes, les rendant davantage vulnérables aux violences masculines et à l’exploitation, nous lutterons pour plus de justice sociale, pour un accès au logement pour toustes, pour la régularisation de toustes les sans-papiers. À la place de la focalisation des droites sur la question de la répression sécuritaire, nous prônons une « culture de la protection », qui protégerait les victimes et non plus les agresseurs. Dans la lignée des préconisations de la CIIVISE, des associations féministes et des mères en lutte, cette culture de la protection reviendrait par exemple à retirer l’autorité parentale aux hommes violents dans des contextes de violences conjugales et/ou de violences sexuelles sur les enfants.
Sources
TURCHI Marine, Faute de preuves, Enquête sur la justice face aux révélations #MeToo, éd. Seuil, oct. 2021.
Le rapport public de la CIIVISE, consultable en ligne (https://www.ciivise.fr/le-rapport-public-de-la-ciivise/)
https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/151223/pourquoi-nous-demissionnons-de-la-ciivise
https://www.francetvinfo.fr/societe/harcelement-sexuel/temoignage-franceinfo-a-peine-nommee-la-nouvelle-vice-presidente-de-la-ciivise-accusee-dagressionsexuelle_6349432.html