En Kanaky, la démocratie est dans la rue

Le 28 Mars 2024, Emmanuel Macron annonce le dégel du corps électoral en Kanaky pour permettre aux colons français de participer aux élections, nouvelle étape de la colonisation de la Kanaky. Plus de 80 000 personnes ont manifesté contre le dégel depuis début avril et le mouvement s’est radicalisé ces dernières semaines donnant lieu à une véritable répression coloniale des Kanaks.

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Le dégel du processus décolonial pour l’achever

En 1998 à la suite des accord de Nouméa, la constitution de la 5ème République avait été modifiée pour permettre à la Kanaky d’accéder à une certaine indépendance, le contenu de l’accord étant anticonstitutionnel, le gouvernement Macron prévoit de retirer ce changement à la constitution pour réintégrer pleinement la Kanaky à la France, cela implique le dégel du corps électoral aux élections locales. Depuis 1998 ne pouvait voter que celleux inscrits sur les listes depuis 1988 et leurs enfants, permettant donc normalement à tous les Kanaks de voter, mais conséquence de l’administration coloniale, plusieurs milliers ne pouvaient pas prouver leur présence en Kanaky avant 1988 et n’étaient donc pas présents sur les listes, cela empêche toute une partie de la jeunesse Kanak, descendantes de ces personnes de voter.

L’accord de Nouméa à permis de geler le processus de décolonisation entamé dans les années 1980 mais pas le processus de colonisation, les colons ont continué de s’installer avec des avantages financiers et fonciers de la part de l’État, les entreprises françaises continuent de s’y installer, les principaux employeurs de Kanaky sont les groupes miniers qui emploient un quart de la population (75 000 travailleur.euse.s), on retrouve ensuite les communications et le tourisme, un important nombre de travailleur.euse.s sont employé.es par des petits-bourgeois caldoches dans les commerces, entreprises de livraison et exploitations agricoles; en Kanaky rien n’appartient aux Kanaks.

En Kanaky, les Kanaks c’est 40% de la population, mais 95% de la population carcérale et 25% sont au chômage mais c’est aussi trois quart d’entre eux qui sont descendus dans les rues début avril. Le dégel du corps électoral c’est la fin du processus de colonisation de la Kanaky, après avoir minorisé démographiquement les Kanaks il faut minoriser leur voix dans les élections.

 

Une polarisation entre les institutions et la rue

Le gouvernement et l’extrême-droite se cachent derrière les trois référendums pour justifier la situation actuelle, mais dès 1984 les Kanaks ont boycotté les élections pour descendre dans la rue porter leurs voix déclenchant une situation de révoltes similaires à celle actuelle conduisant aux accords de Matignon de 1988; en 2021 les élections ont aussi été boycotté et les Kanaks sont aujourd’hui dans la rue pour s’exprimer.

La lutte menée par la jeunesse dans la rue aujourd’hui est celle pour l’indépendance et non celle des indépendantistes ignorés par cette jeunesse; les jeunes ayant le droit de vote s’abstiennent pour beaucoup aux élections provinciales et aux référendums.

Ces révoltes composées d’émeutes, de blocages et de grèves ont permis une convergence des travailleur.euse.s et des jeunes Kanaks, la lutte doit être mené sur le terrain révolutionnaire et non institutionnel, les boycotts des élections provinciales de 1984 et du référendum de 2021 valent bien plus que les résultats de ces scrutins.

Selon le Collectif Solidarité Kanaky : “Ce 13 mai 2024 les deux fédérations USTKE, T.H.T (Transports aériens et terrestres, Hôtellerie) et Ports & Docks entrent en grève, suivie à 99 %. Au port, sortie uniquement de marchandises de 1ère nécessité (denrées périssables et médicaments), toutes les sociétés du port ont décidé de fermer à 15H. Ralentissement de l’économie aujourd’hui. La chefferie de Wetr à Lifou a décidé la fermeture de l’aéroport de l’île. À l’aéroport à Tontouta, les vols des avions ont pris énormément de retard du fait que les salariés ont quitté leurs postes donc perturbant le fonctionnement des services sur l’aéroport.”, s’ajoutent les blocages des différents axes routiers et incendies de commerces, les Kanaks imposent un important rapport de force par la pression économique.

Du côté des des organisations indépendantistes (UC-FLNKS et UNI) il n’y a rien à attendre, ces dernières appellent à l’apaisement et disent que la prochaine étape est “le dialogue au niveau institutionnel à Paris”, le président indépendantiste Louis Mapou dit même qu’il ne faut pas bloquer l’économie déjà en difficulté, comme partout dans le monde les leaders des organisations de libération nationale petite-bourgeoise ne cherchent pas plus loin que leurs intérêts en devenant les gestionnaires locaux de la misère, heureusement les prolétaires Kanaks se font peu d’illusions quant aux objectifs de ces politiciens.

Quand les revendications sortent du cadre institutionnel établi par les impérialistes, elles sont claires et réelles, contrairement aux illusoires dialogues de salon qui ne mènent à rien, le pouvoir sait y répondre : la CRS 8, le RAID, le GIGN et l’armée ont été envoyés au lendemain des premières émeutes le 13 Mai, ce sont les même unités de polices qui ont participé à l’opération Wuambushu et aux révoltes suites à la mort de Nahel qui sont envoyé en Kanaky, un couvre-feu a été mis en place, TikTok bloqué et le Haut-Comissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a dit de manière détournée que le GIGN avait autorisation de tuer. L’armée a elle été envoyée pour sécuriser les ports et aéroports, comprendre sécuriser l’accès des forces de répression à l’île et maintenir l’exportation des ressources pillées, une véritable ingérence des frontières.

 

Ni dialogue, ni accords avec le gouvernement français. Solidarité contre le colonialisme ! 

Les différents gouvernements français n’ont fait qu’apaiser les tensions avec les fausses promesses des différents accords, cette fois les travailleur.euses Kanaks doivent mener leur lutte elleux-mêmes jusqu’au bout. Alors que Macron et Darmanin vont en Kanaky pour “rétablir l’ordre et permettre la reprise du dialogue” on se demande de quel dialogue ils parlent, quand le troisième référendum a été imposé en plein période de deuil ? quand ils ont refusé de reconnaître l’importante abstention à celui-ci ? quand ils ont ignoré 80 000 manifestant.e.s dans les rues en avril ?

Comme nous le faisons depuis octobre en soutien avec le peuple palestinien, descendons dans la rue cette fois contre notre propre impérialisme avec les axes radicaux de la deuxième vague de solidarité. Ce samedi 25 Mai, 2000 personnes à Paris et plusieurs centaines ailleurs ont manifesté pour exprimer leur solidarité avec le peuple Kanak contre l’impérialisme et le colonialisme français. Le mouvement ouvrier en France joue un rôle important dans la solidarité internationale avec la Kanaky, il faut que les syndicats français coordonnent les actions et les blocages avec les syndicats Kanaks. Stop à la colonisation, à l’état d’urgence, à la répression coloniale, retrait des troupes françaises en Kanaky et respect de toutes les demandes d’autodétermination.

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