Par Renzo Fabb, 19 janvier 2023
Source : Izquierdaweb.
Au Pérou, les manifestations contre le gouvernement de Dina Boluarte continuent de prendre de l’ampleur. Depuis lundi, des milliers de manifestants venus de différentes régions du pays sont arrivés à Lima dans le cadre de ce que l’on a appelé « la prise de Lima ». Vendredi, le pays sera paralysé par une grève générale qui s’annonce massive.
La grève a été lancée par la principale confédération syndicale du pays, la Confédération générale des travailleurs péruviens (CGTP), et bénéficie du soutien de dizaines d’autres syndicats qui se joindront à la journée d’action.
L’appel exige la démission immédiate de Boluarte et des autorités du Congrès, la convocation immédiate d’élections et la convocation d’une Assemblée constituante. Depuis la destitution de Castillo par le Congrès le 7 décembre, on assiste à un rejet généralisé de l’ensemble du régime politique.
La confédération syndicale a publié des sondages selon lesquels environ 70 % de la population voterait en faveur d’un référendum visant à convoquer une Assemblée constituante.
Depuis lundi, après que le gouvernement a autorisé l’intervention militaire dans de nombreux districts du pays, les manifestations régionales ont pour objectif de converger en une grande journée unifiée à Lima. Depuis ce jour, des centaines de manifestants arrivent chaque jour à la capitale, mais la participation a considérablement augmenté jeudi et devrait être plus importante vendredi, dans le cadre de la grève générale.
L’appel à une protestation nationale unifiée a été baptisé « la toma de Lima » (la prise de Lima) ou « la marcha de los cuatro suyos » (la marche des quatre suyos), en référence à la division territoriale originale des Incas.
Le gouvernement dans les cordes ?
Boluarte et les autres partis du congrès ont d’abord tenté d’apaiser les protestations en avançant les élections de 2026 à 2024, mais cela n’a pas fonctionné.
Ensuite, le gouvernement est passé sans médiation à la répression la plus brutale, avec des massacres contre la population ( déjà 50 morts ) et en faisant même descendre l’armée dans les rues dans certaines régions. Il semblerait que la violence du gouvernement s’est retournée contre lui, car les protestations n’ont fait que croître, alimentées par l’indignation causée par les meurtres commis par la police et l’armée.
Si le recours aux forces armées témoignait déjà d’une certaine faiblesse politique de la part du gouvernement, l’incapacité à apaiser les mobilisations, même par la répression la plus violente, pourrait ouvrir une crise au sein de l’alliance des partis du régime qui ont participé au coup d’État contre Castillo.
Dans ce contexte, la grève générale du vendredi 20 janvier a une importance énorme, car elle peut signifier un coup très dur pour le gouvernement putschiste. Un gouvernement qui a fait le pari de discipliner les masses populaires par la destitution de Castillo.
Si Castillo n’a pas pu résister, c’est non seulement parce qu’il n’a pas voulu s’appuyer sur les masses populaires pour se défendre, mais aussi parce qu’il n’a tenu aucune des promesses par lesquelles la classe ouvrière et les indigènes du Pérou l’avaient soutenu
La crise chronique que vit le régime politique péruvien depuis des années peut avoir une issue si la classe ouvrière et les secteurs populaires interviennent dans la situation, et cette opportunité se présente maintenant. La grève générale du vendredi 20 janvier, la résistance à la répression et la continuité des manifestations peuvent offrir une issue à la crise, après que les partis de la bourgeoisie aient conduit le pays au désastre à plusieurs reprises.