25 novembre : Toutes dans la rue !

Ce samedi 25 novembre avait lieu, dans le monde entier, la journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes.

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Ce samedi 25 novembre avait lieu, dans le monde entier, la journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes. De Paris à Marseille en passant par Toulouse et Lille, et plus largement en Italie, en Espagne, aux États-Unis, en Argentine ou encore en Turquie, des centaines de milliers de personnes ont battu le pavé pour demander des mesures ambitieuses afin de lutter contre les violences sexistes et sexuelles.

 

Une journée historique et mondiale

La journée de mobilisation du 25 novembre ne date pas d’hier. Elle fait référence à l’assassinat des sœurs Mirabal le 25 novembre 1960, tuées parce que résistantes en République dominicaine. Leur mort marque les esprits et entraîne de fortes révoltes dans le pays qui vont jusqu’à l’assassinat du dictateur Rafael Trujillo. En 1999, c’est en mémoire de ces trois résistantes que les Nations Unies décident que la journée symbolique de lutte contre les violences faîtes aux femmes sera le 25 novembre. Depuis, chaque année, des mobilisations de tous types ont lieu partout sur la planète, réunissant toujours plus de monde.

En Argentine, plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont réunies dans les rues, dont 5000 à Buenos Aires. Le mot d’ordre principal était la défense des politiques de genre, fortement menacées depuis l’élection de Javier Milei qui prétend que « la violence n’a pas de genre ». Était aussi demandé un droit à l’avortement « sûr, libre et gratuit ». La mobilisation était particulièrement massive cette année en Italie, avec une forte présence des jeunes étudiantes et lycéennes. Le pays est encore marqué par le meurtre de Giulia Cecchettin par son ex-compagnon le 11 novembre dernier, alors qu’elle n’avait que 22 ans. La réclamation de politiques ambitieuses pour lutter contre les féminicides était sur toutes les bouches et banderoles italiennes. Tout comme en Espagne où, malgré des efforts conséquents pour combattre les violences machistes, on ne peut que constater une augmentation significative des féminicides et actes de violence sexiste.

Mais cette année, la journée du 25 avait une dimension particulière. Au milieu des slogans dénonçant la normalisation du viol, l’inconséquence de la justice, la minimisation des violences psychologiques ou encore l’invisibilisation des violences transmisogynes, on pouvait apercevoir des pancartes en solidarité avec les femmes palestiniennes. Depuis bien longtemps, elles sont les principales victimes de la colonisation israélienne en Palestine. Avec les enfants, elles représentent 70 % des personnes mortes à Gaza depuis le 7 octobre. C’est donc tout naturellement que les mouvements féministes ont tenu à exprimer de façon massive leur soutien aux Palestiniennes, ainsi que leur condamnation de la politique colonialistes et génocidaire d’Israël ou encore de l’utilisation du viol comme arme de guerre à part entière. Un mouvement de solidarité internationale qui justifie d’autant plus que slogan aperçu à Madrid : « C’est fini, notre lutte est mondiale. »

 

En France, une situation alarmante

En France, les marches dans de multiples villes ont réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes. Et pour cause, les violences misogynes ne sont pas un lointain souvenir. Le nombre de féminicides par an ne diminue pas, c’est même le contraire. En 2021, des associations avaient décompté 113 femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint. En 2022, c’était 147 mortes en raison de leur genre. Avec les 117 féminicides déjà recensés depuis le début de l’année, il y a fort à parier que l’année 2023 soit une année record. À savoir que ce décompte réalisé par l’Inter Orga Féminicides ne prend pas en compte les suicides forcés dans le couple. Les chiffres des violences sexuelles ne sont pas plus encourageants. Selon Amnesty Internationale, 94 000 femmes sont victimes de viol ou de tentative de viol chaque année. Et l’organisation précise bien qu’il s’agit d’une estimation minimale. Ipsos déclare qu’en 2020, 81 % des femmes disaient avoir subi du harcèlement sexuel dans un lieu public. Entre 2017 et 2019, 51 % d’entre elles ont déclaré avoir été victime de harcèlement sexuel au travail. Liste non exhaustive de chiffres, puisqu’on pourrait parler aussi du harcèlement sexiste au travail, des violences conjugales qui ne mènent pas à la mort mais qui sont profondément destructrices pour les victimes, des violences transmisogynes particulières que vivent les femmes trans (parmi les 375 personnes trans tuées en 2021, 96 % étaient des femmes) ou encore des risques immenses auxquels s’exposent quotidiennement les travailleuses du sexe, et ce dans l’indifférence la plus totale.

Face à cette pression violente, les institutions policières et judiciaires ne sont pas au rendez-vous malgré les alertes incessantes des associations et collectifs d’aide aux victimes. L’accueil des plaintes dans les commissariats n’est toujours pas satisfaisant. À cause de ce refus global de prendre au sérieux les violences sexistes, la plupart des victimes n’osent pas porter plainte ou simplement se signaler. Selon le ministère de l’Intérieur, seulement 12 % des victimes de viol arrivent à porter plainte. Et quand bien même un service de police ou de gendarmerie ferait son travail, pas sûr que la justice prenne le relais. Sur le peu de plaintes déposées, 73 % sont classées sans suite. Résultat : moins de 1 % des violeurs sont condamnés pour viol. Et le scénario est le même quant aux violences conjugales. Plus de la moitié des femmes tuées par leur conjoint ou ex avait fait un signalement. De façon générale, il est largement observable que la justice, quand elle n’est pas directement complice, reste tristement passive ou impuissante devant les nombreux cas de violence qui se présentent à elle.

 

Un appel large pour des revendications claires

Comme chaque année, et malgré les divisions présentes dans le mouvement feministe français, il y a eu finalement un appel unitaire à manifester samedi 25 novembre. L’ONG Nous Toutes inclue dans l’inter-orga Féminicides fait partie des signataires et a eu une présence remarquable dans l’initiative. Elles ont été rejoints par de nombreuses organisations comme l’Association des Familles de Victimes de Féminicides ou le collectif féministe révolutionnaire Las Rojas et la plupart des syndicats et des partis politiques de gauche. Cet appel large a permis de fédérer un grand nombre de personnes autour de multiples revendications. Une attention particulière était donnée à la prévention, les organisations demandant plus d’éducation à l’égalité et au consentement chez les enfants mais aussi chez les personnels enseignants et d’accompagnement, et un grand plan de recherche autour des violences de genre. Elles ont aussi évidemment demandé plus de moyens dans l’accompagnement des victimes, y compris sur les lieux de travail, et pour les centres d’hébergement qui sont aujourd’hui dans une situation critique à cause du nombre croissant de demandes.

Cette demande est vitale à l’heure actuelle où, par exemple, « Du côté des femmes 95 », une association d’accompagnement des victimes avec 40 ans d’expérience dans le Val d’Oise, a dû fermer par manque de moyens. Nous avons participé à plusieurs actions en soutien aux salarié.es de DCDF, mais l’association connaît la fin de ses jours à cause de l’absence de réponse de l’Etat national et régional. De même pour l’asso Léa, en Essonne, dont nous voyons des licenciements et la réduction des services face au manque de subventions. La Fondation des femmes a estimé à 2,6 milliards d’euros la somme nécessaire pour développer les infrastructures pour la prévention et l’accompagnement.

Des manifestantes ont aussi revendiqué une égalité effective dans l’accès à certains droits, notamment à celui à l’avortement avec la remise sur pieds de l’hôpital public, mais aussi celui à la justice avec un investissement massif. 

Ces nombreux points nous rappellent une chose : les inégalités de genre ne sont pas une fatalité mais dépendent de choix politiques. Le président de la République et son gouvernement voulaient faire de l’égalité femmes/hommes la « grande cause du quinquennat », ils n’ont qu’à appliquer ce que les organisations leur répètent de faire depuis déjà plusieurs années. Les solutions sont là mais demandent une volonté politique ambitieuse qui va au-delà des beaux discours et des Grenelles. Ces mesures demandent aussi de l’argent. Mais dans la sixième puissance économique mondiale, il y a de l’argent, il suffit d’aller le prendre là où il est. Par son déni et son inaction, le gouvernement laisse se produire harcèlement, humiliations, violences, mutilations voire meurtres sur des femmes, autres minorités de genre et des enfants.

Organisations politiques, associatives, féministes, LGBTQIA+, de protection de l’enfance, antiracistes, continuons à nous mobiliser. Dans la rue, sur nos lieux de travail et d’étude, sur les réseaux sociaux, faisons entendre une voix de lutte contre le patriarcat et toutes formes d’oppression pour tout le monde, que ce soit en France, mais aussi à l’international. Soutenons massivement les mouvements et collectifs étrangers qui luttent pour l’égalité entre les genres et entre toutes les personnes quelles qu’elles soient.

« Notre lutte est mondiale ! »

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